Nos réponses à la Charte d'engagement pour les utilisateurs de pesticides en Charente

« Charte d'engagements départementale des utilisateurs agricoles des produits phytopharmaceutiques » : Nos réponses
Pour lire la charte soumise à concertation publique : http://www.charte-engagement-charente.fr/fileadmin/user_upload/Nouvelle-Aquitaine/181_Eve-Charte-engagement-charente/Documents/Charte/Charte_de_la_Charente.pdf
Pour donner votre avis : http://www.charte-engagement-charente.fr/charte-dengagement-en-charente/donner-votre-avis/
Les modalités d'informations
L'information ne protège pas des pesticides !
Cette charte ne fait que déplacer le débat sur cette question. L'urgence est de sortir de ce modèle dangereux pour la santé des paysan-ne-s, des riverain-e-s et de l'environnement, et non pas de savoir si 5 ou 10 mètres seront nécessaires pour protéger les populations ! Ces chartes d'engagement sont même dangereuses, car elles ne constituent aucune solution pour la sortie des pesticides et risquent de détourner l'attention d'un objectif de protection de l'ensemble de la population.
De plus, les modalités d'information des riverain-e-s nous semblent faibles : les chartes ne sont-elles pas faites pour protéger les pesticides vis à vis de l'inquiétude, légitime, qui monte parmi les riverains, plutôt que pour véritablement protéger les riverains ?
Les distances de sécurité
Pour notre syndicat, la dangerosité des pesticides est directement liée à la dangerosité des produits et non pas à des "mauvaises pratiques". Mettre en place des ZNT (3, 5 ou 20m pour les produits les plus dangereux) puis permettre d'y déroger (à l'exception des 20m) avec des chartes, ce n'est pas une solution. Des ZNT quelles qu'elles soient sont anecdotiques et ne permettent pas de protéger les paysan-ne-s exposé-e-s, et ne peuvent rien non plus contre la volatilité des pesticides, l'effet des perturbateurs endocriniens à des doses infimes, ou encore les effets "cocktail" imprévisibles. Surtout quand on est le second département le plus consommateur de glyphosate en France, avec 325 tonnes vendues en Charente en 2018.
https://www.charentelibre.fr/2020/06/03/325une-etrange-boule-de-poils,3606580.php
Pour la Confédération Paysanne, il faut une vraie politique publique de sortie des pesticides. A savoir : l'interdiction des produits les plus toxiques – les cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques (CMR*) et perturbateurs endocriniens (PE) et l'accompagnement pour une transition agroécologique. La meilleure façon de protéger la santé des paysan-ne-s et de la population, est de permettre au monde agricole de s'affranchir des pesticides. Cette interdiction devant être accompagnée de mesures économiques (aides à la transition, à l'agriculture biologique, structuration des filières locales, etc.) et commerciales (fin des accords de libre-échange, arrêt des importations de produits traités à des pesticides interdits en France, prix minimum d'entrée sur le marché national, etc.) permettant aux paysan-ne-s de changer leurs pratiques, de relocaliser l'agriculture et de vivre de leur métier.
Plutôt que des distances de sécurité, nous souhaitons voir apparaître dans cette charte des engagements de la Chambre d'agriculture, les organisations techniques agricoles et les collectivités locales pour le développement des accompagnements techniques et financiers, permettant de sortir des pesticides. C'est par le concret, par les réussites de terrain, en expérimentant, en testant du matériel, en mobilisant les CUMA et ETA que les peurs disparaitront. Se passer de traitement deviendra un souhait, un défi et non plus une injonction subie et révoltante.
Modalités de conciliation
La conciliation et le dialogue ne protègent pas des pesticides ! Dans certaines situations, ils peuvent à minima permettre d'assurer une transparence sur les produits utilisés et les moyens de traitement, et permettre d'anticiper leur utilisation. Mais la transparence ne protège pas non plus.
Dans les modalités de dialogue et de conciliation évoqués page 8, il nous semble que cette Charte se repose beaucoup sur les maires et les agriculteurs pour organiser, maintenir les bonnes relations de voisinage. L'État doit prendre sa part de responsabilité et non pas se décharger sur les territoires !
gouvernement, par ce dispositif qu'il renvoie à la charge des préfets, fragmente la problématique des pesticides en une multitude de problématiques territoriales ce qui lui permet de n'avoir plus à gérer les choix politiques destructeurs qu'il fait au niveau national.
Mesures complémentaires
Les « bonnes pratiques » évoquées en second point des mesures complémentaires, et cette charte de manière générale, renvoient aux paysans la responsabilité de l'empoisonnement par les pesticides, et c'est inadmissible puisque ce bien l'ANSES*, l'Etat et les firmes qui les mettent sur le marché qui en sont responsables !
Les pesticides représentent malheureusement une arme de compétitivité dans un contexte de libre-échange acharné ! Le modèle agro-industriel libéralisé enferme les paysan-ne-s dans la recherche permanente de volume et de productivité au travail, au détriment de la santé des humains, la leur en premier, et celle de l'environnement. Et cette charte ne permet aucune remise en question de notre modèle agricole : elle l'entérine.
Puisqu'il s'agit d'une « charte d'engagements », nous devons avoir l'honnêteté de nous engager vraiment et de prendre pour une fois des décisions contraignantes ! Cette Charte se doit d'être ambitieuse et de répondre aux attentes des paysan-nes, des élu-e-s et des citoyen-ne-s ; sans quoi la déception et le ras-le-bol n'en seront qu'exacerbés. Soyons responsables : faisons de cette charte d'engagements des utilisateurs agricoles de « produits phytopharmaceutiques » de la Charente un véritable point de départ à notre trajectoire de sortie des pesticides.